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ttyemupt
7 septembre 2012

Réquichot et son corps

Réquichot et son corps

 

Je ne sais pas c'qui m'quoi.

 

Le corps

 

Dedans.

 

Beaucoup de peintres ont reproduit le corps humain, mais ce corps était toujours celui d'un autre. Réquichot ne peint que son propre corps: non pas ce corps extérieur que le peintre copie en se regardant de travers, mais son corps du dedans; son intérieur vient dehors, mais c'est un autre corps, dont l'ectoplasme, violent, apparaît brusquement par l'affrontement de ces deux couleurs: le blanc de la toile et le noir des yeux fermés. Une révulsion généralisée saisit alors le peintre; elle ne met au jour ni des viscères ni des muscles, mais seulement une machinerie de mouvements répulsifs et jouissifs; c'est le moment où la matière (le matériau) s'absorbe, s'abstrait dans la vibration, pâteuse ou suraiguë: la peinture (employons encore ce mot pour toutes sortes de traitements) devient un bruit ("L'extrême aigu du bruit est une forme de sadisme"). Cet excès de la matérialité, Réquichot l'appelle le méta-mental. Le méta-mental est ce qui dénie l'opposition théologique du corps et de l'âme: c'est le corps sans opposition, et donc, pour ainsi dire, privé de sens; c'est le dedans assené comme une gifle à l'intime.

Dès lors la représentation est troublée, la grammaire aussi: le verbe "peindre" retrouve une curieuse ambiguïté: son objet (ce que l'on peint) est tantôt ce qui est regardé (le modèle), tantôt ce qui est recouvert (la toile): Réquichot ne fait pas acception d'objet: il s'interroge en même temps qu'il s'altère: il se peint à la façon de Rembrandt, il se peint à la façon du Peau-Rouge. Le peintre est à la fois un artiste (qui représente quelque chose) et un sauvage (qui peinturlure et scarifie son corps).

 

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